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1983 Chic-Bull Magazine nº 17

Jacques Loustal : Impressions d'orient

Novembre / Décembre 1983
Est l'organe officiel et gratuit de la libraire Chic-Bull, 46, Boulevard Lemonnier B-1000 Bruxelles
i.s.s.n 0771-4734


JACQUES LOUSTAL : IMPRESSIONS D'ORIENT
  
Loustal 1983

II est trop tard pour dire que vous avez découvert en Jacques Loustal un génie. En effet, dès 1982, Marc Voline, esthète éclairé s'il en est, déclarait dans l'«Année de la BD» qu'avec «Clichés d'Amour», son deuxième véritable album, Lous­tal donnait pour la première fois toute la mesure de son talent : «Son trait s'est affiné, ses cadrages rodés, gagnant en impact, et il obtient de ses couleurs des effets absolument insoupçonnés auparavant, se révélant au paysage un remarquable paysagiste»...

Depuis lors, Loustal a séjourné pendant 18 mois sous le soleil marocain. Il nous en ramène «Cours de sable», une bande dessinée de longue haleine qui paraîtra dits février dans («A SUIVRE») et une série de paysages à l'aquarelle de la très belle Zenata Plage. A vous de le découvrir...

Chic-Bull Magazine - Les obligations militaires ne semblent pas avoir été une dure corvée pour Jacques Loustal...

Jacques Loustal - Mon service civil m'a amené à faire un séjour d'une année et demi au Maroc, et ce en qualité d'architecte. A côté de l'endroit où j'étais «basé» se trouvait Zenata-Plage. J y ai réalisé quantité d'aquarelles et de croquis. Une trentaine de celles-ci vont prochainement être mises en album par les éditions Magic-Strip. Ce sont des travaux qui avaient été faits de façon très naturelles.

Cependant, à mon retour, l'envie s'est faite pressante d'utiliser pour une bande dessinée toute la documentation matérielle et imaginaire que j'avais réunie. J'en ai parlé avec Jacques Paringaux, mon scénariste habituel, qui a confronté ma vision «vécue» au Maroc avec la sienne, plus proche du côté mythique de l'Orient. Si on sent naturellement que notre histoire se passe dans un pays oriental, celui-ci n'est néanmoins pas situé géographiquement.

Cette fertile gestation á fait passer le projet initial de 20 à quelques 62 planches.

C.B.M. - «Coers de sable», votre nouvelle histoire, met en scène quatre personnages...

J.L. - ... En effet. L'officier français et le Prince arabe sont tous les deux amoureux de Baby, une jeune et jolie joueuse de tennis américaine. Quant à l'allemande Eva, le lecteur sentira aisément qu'elle est également éprise de son amie américaine. Notre histoire présente donc un côté romanesque prononcé...

Le Prince arabe enlève finalement Baby pour l'amener dans sa retraite située au fin fond d'un très beau désert. Ce qui obligera l'officier français - qui a entretemps été obligé de démissionner de l Armée suite à une machination du Prince arabe - et Eva à unir leurs efforts pour retrouver la belle américaine. Une quête qui sera nécessairement ponctuée d'aventures !

C.B.M. - Vous avez également changé de revue pour publier cette histoire.

J.L. - Je crois tout d'abord qu'un dessinateur ne doit pas s'attacher à une revue. C'est pour cette raison que j'ai toujours tenu à réaliser les travaux de commande que l'«Echo des Savanes», «Pilote» ou «Rock & Folk» me demandaient.

Ceci étant dit, dès le début, Paringaux et moi avons pensé que «Coeur de sable» était fait pour paraître dans un support comme («A SUIVRE»), étant donné son côté «littéraire» et son aspect «Roman en BD». Jusqu'à présent, les histoires que j'avais réalisées étaient parues dans des numéros 'spéciaux ou non de la revue «Métal Hurlant». Leur brièveté me permettait de changer d'approches et de styles graphiques. Mon second et dernier album en date - «Clichés d'amour» - fonctionnait donc comme une balade au sein d'une série de nouvelles.

C.B.M. - Comment te situes-tu dans le petit monde de la BD ?...

J. L. - Il faut tout d'abord dire que si je regarde de temps en temps des bandes dessinées, je ne les lis que très rarement. La photographie et !a peinture m'ont certainement plus influencé que la BD. C'est peut-être ce qui m'a évité d'être marqué de façon évidente par l'influence d'un «Maître», chose si fréquente dans notre milieu. Cela m'a également permis d'avoir une capacité plus grande à changer de style. Ce qui est le plus important pour moi, c'est d'arriver à apporter une lecture différente du rapport entre le texte et l'image. Le lecteur ne doit plus avoir l'obligation ou le droit de subir l'image comme une redondance du texte. Il dout y avoir un plus grand «décalage.

Sur un autre registre, dans «Coeurs de sable», il n'y a pas de «bulles» : textes et dialogues sont inté­grés en. dessous de l'image.

De plus, j'ai l'impression que l'auteur de BD vit en vase clos. Moi, j'aime voyager et utiliser tout ce que je vois. Et puis il y a aussi cette hantise d'avoir à refaire la même chose, la même histoire...

Propos recueillis par Michael de Zulawski. Paris, le 19 novembre 1983.

Albums de Jacques Loustal
Loustal (éd. Rudler)  épuisé
New-York Miami (Humano) 

Clichés d'Amour (Humano) 
Zenata-Plage (Magic-Strip) janvier 1984