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Barney Wilen March 4, 1937 - May 25, 1996 Basically
a tenor player, Wilen made his name when Miles Davis chose him to play in
a group he was fronting in
Wilen's
subsequent visit to play at Newport in 1959 is commemorated by the Fresh
Sound CD, although there's only 20 minutes of music from that occasion:
Akiyoshi plays exuberant bebop piano in support and Wilen's even, supple
tenor works patiently and impressively through `Passport' and `Barney's
Tune', with what was then a rare appearance of the soprano on "Round
Midnight', in which his tonal control is impressive. Two other tracks of
unclear date find him with Powell (very subdued), Terry and Clarke;
Wilen's solo on `No Problem' is typically artful - since the recording is
subject to some vagaries of balance, he seems to emerge from the shadows
here. There is also another "Round Midnight' with a German rhythm
section. The sound is very mixed throughout but it's listenable enough.
Wilen's
contract for IDA helped create a comeback for a fine musician. In the
1980s he tinkered with jazz-rock and African rhythms (he went to live in
Africa in the late 1960s) and his return to a bop-inflected style has
something of the full-circle maturity which Stan Getz came to in his later
work; Wilen's tenor sound does, indeed, have something of the magisterial
sweep which Getz delivered, but the main character of his playing
continues to lie in his even trajectory. His solos have a serene assurance
which eschews dynamic shifts in favor of a single flowing line. With his
tone still exceptionally bright and refined, it grants his playing a rare,
persuasive power. La Note Bleue was a disappointing start, though, because the record is so bitty: what seem to be little fragments and codas from longer pieces are made into whole tracks, the material is dryly over-familiar, and the pieces are cut short before the group can get going. With Wilen perfectly adept at long solos, this foreshortening sounds wrong. French Ballads is better, although some of the playing again seems proscribed, and Wilen dispatches a few of the themes with a too casual finesse. Wild Dogs Of The Ruwenzori finally establishes his second wind: it's beautifully programmed, with straight-ahead swingers, hints of calypso rhythm and a few deftly understated fusion pulses setting a delightful variation in tempos The title-tune and 'Pauline Extended' bond Wilen's solos into a tight electronic framework, but his latest reflections on Rollins in `Little Lu' and the two versions of `Oh Johnny' are flawlessly paced and delivered. The rhythm section does well on all three records.
Sanctuary
continued Wilen's good run. Catherine switches between acoustic and
electric instruments and Wilen chooses classical rapture or firm,
propulsive lines depending on the tempo. Danielsson's third voice is
immensely rich and apposite. One might pick out the absolutely lovely
reading of `How Deep Is The Ocean', but there's scarcely a weak moment on
the record.
A
certain waywardness crept into Wilen's playing; while it subverts some of
the sax-meets-rhythm expectations, it isn't always comfortable. The duet
with Jean-Marie comes from a 1991 festival appearance: Wilen sounds rusty
on `Latin Alley' and the exposed format doesn't always suit him, but the
long, serpentine lines of `No Problem' and `Afternoon In Paris' have all
his old mastery. His tone on tenor is taking on a foggy side which sounds
even more pronounced on the rare baritone outing on `Blues Walk' from
Barney Wilen Ce
microsillon était attendu de tous depuis plusieurs mois. Sa sortie était
tenue pour une date importante dans la carrière de Barney Wilen. « Le
premier grand album de Barney, et sous son nom, you dig ? », disait-on
rue Saint-Benoît. On a, il est vrai, beaucoup parlé de ce recueil avant
sa parution : Barney Wilen, qui est, à l'âge de 23 ans, un saxophoniste
de réputation mondiale (tous les journaux spécialisés que nous
connaissons, de l'Europe et des deux Amériques, lui ont consacré des
articles) avait enregistré, aux plus beaux jours d'avril 1959 (le 24 et
le 25) quelques bandes magnétiques en compagnie de deux compatriotes et
de deux « américains à Paris». La composition de ce groupe ne résultait
pas d'un accommodement avec le hasard mais d'un choix défini que la
circonstance rendait possible : en rassemblant Duke Jordan (piano), Paul
Rovère (contrebasse) et Daniel Humair (batterie), on formait une section
rythmique d'esprit étonnamment jeune, capable de créer le climat le plus
favorisant pour Barney. En donnant à celui-ci Kenny Dorham (trompette)
pour partenaire, on lui donnait un illustre compagnon une sorte de parrain
couronné, dont la seule présence paraît le filleul d'un nouveau titre
de noblesse. Besamo
mucho, Lady Bird, Jordu et surtout Stablemates vous feront sans doute découvrir
un Barney Wilen que vous n'aviez jusqu'ici qu'entrevu. C'est un
saxophoniste accompli, merveilleusement lyrique et inspire, swinguant
comme un possédé, que ces morceaux vous révéleront. La jeune voix de
son tenor chante des melodies improvisées dont l'exactitude rythmique qui
évoque celle du grand Hawkins ; ses variation émues sur un motif ont la
flamme d'un Bechet. Mais c'est déjà trop de deux comparaisons : ce
qu'exprime Barney Wilen est bien de lui, et s'il convient as noter qu'il
connaît les grands maîtres, il faut observer aussi qu'il garde toujours
l'accent de sa Nice ensoleillée (où il naquit le 4 mars 1937, sous le
signe des Poissons), avec le côté souvent «tzigane» du cat qui a
beaucoup écouté Grappelly. Stéphane, justement, un jour où il vint rue
Saint-André-des-Arts (la bien nommée) entendre ce disque pour la première
fois, sous le regime du «blindfold test», apprit avec surprise que le
saxophoniste dont il avait tant apprécié l'audition était Barney. II s'écria
: « Sans blague ? C'est le petit qui habitait à deux portes d'ici ? Eh
bien, c'est devenu un grand musicien !» On ne saurait mieux dire. «J'avais proposé à Sonny Rollins de jouer à San Remo en me
disant : ça fera plaisir à Barney de l'entendre en direct...» C'est
Marcel Romano qui, fouillant sa mémoire pour retrouver l'histoire, les
anecdotes qui entourent les séances de Barney, évoque, entre autres
digression, le «cadeau» qu'il avait voulu faire au plus jeune des deux
saxophonistes - Barney Wilen avait vingt-et-un ans, Rollins vingt-huit, et
le festival de San Remo devait avoir lieu les 21 et 22 février 1959, soit
un peu plus d'un an après que Marcel Romano ait offert au jeune niçois
l'occasion d'une rencontre encore plus décisive : la musique du film «Ascenseur
pour l'échafaud» avec Miles Davis... D'autres cinéastes avaient aussitôt
envisagé de renouveler l'expérience. Passionné de jazz et de cinéma,
familier des deux univers, qui souvent s'interpénétraient certains soirs
au Club Saint-Germain, Marcel Romano, catalyseur d'innombrables événements
dans le monde du jazz dont la rue Saint-Benoît était l'un des centres,
s'imposait comme l'interlocuteur, le go-between idéal : « Edouard
Molinaro, qui terminait le tournage d'«Un témoin dans la ville» et
avait apprécié le travail de Miles pour le film de Louis Malle, m'avait
demandé si le trompettiste accepterait de travailler à nouveau pour une
bande-son... Mais Miles était passé à autre chose, il avait d'autres
projets, un nouveau groupe, auquel il tenait - à la rigueur si la musique
avait pu être enregistrée à New York, avec ses musiciens... Comme je
souhaitais mettre Barney sur un « piédestal », j'ai cherché, lors d'un
voyage à New York, un autre trompettiste prestigieux. J'ai fini par
contacter Kenny Dorham, dont on se souvient qu'il avait succédé à Miles
auprès de Charlie Parker et fait partie des premiers Jazz Messengers. Il
a accepté, et je 4 l'ai fait venir à Paris. Pour
compléter le groupe, j'avais fait appel à Duke Jordan et prévu
Kenny Clarke - mais si Kenny apparaît effectivement sur la bande-son du
film, il n'était pas disponible pour les soirées au Club SaintGermain,
ayant été retenu au terme d'une tournée en Italie. C'est donc un
Genevois de vingt ans, installé à Paris depuis quelques mois, qui a tenu
la batterie : Daniel Humair, et il a fait merveille... » Quant à la
contrebasse, certains ouvrages discographiques l'ont attribuée à Gilbert
«Bibi» Rovère, autre transfuge de «l'école niçoise» d'où était
issu Barney. C'était oublier l'aîné des Rovère, Paul, qui fut aussi un
compagnon des premières apparitions publiques du saxophoniste prodige. Mais le moins surprenant avec ce disque n'est pas que sa première
édition ne fasse pas la moindre allusion au lieu où il fut enregistré,
live. Pourtant... «Le Club Saint-Germain, qui de 1953 à 63 était dirigé
par Michèle Michel, a été, raconte Marcel Romano, un lieu mythique du
jazz en Europe. Y jouer était une consécration pour un musicien, tous
les Grands y sont passés - et c'était véritablement un club : pour y
entrer on devait présenter une carte de membre. C'était plus «chic»
que les autres lieux parisiens, certains personnages venaient d'ailleurs
s'y montrer, surtout des gens de cinéma - parmi les habitués, il y avait
Jean-Pierre Melville, Gene Kelly, Jacques Becker, qui y était même venu
avec Gina Lolobrigida... Michèle Michel me faisait confiance lorsque je
lui proposais d'y faire jouer des groupes dont je m'occupais - cela me
permettait de compléter les tournées que j'organisais. Pour élargir
l'audience, j'avais suggéré des «matinées», avec un tarif particulier
qui permettait d'accueillir, le samedi et le dimanche de cinq à sept, des
étudiants... Dès que Barney est «monté» à Paris, il a fait partie de
cette pros grammation spéciale. Beaucoup de jeunes venaient pour écouter,
mais il y avait aussi tout un public de danseurs...» Le microsillon initial (comme ses rééditions pirates) ne
comportait que quatre thèmes, extraits de l'enregistrement des deux soirées
au Club «Besame Mucho, ils ne l'ont joué qu'une fois... Quant au thème
qui allait devenir celui du film de Molinaro,Témoin dans la ville, on
l'appelait aussi, en plaisantant, La vie n'est qu'une lutte. . .
Everything Happens To Me, entre autres thèmes qui ne figuraient pas dans
la première sélection, était aussi l'une des premières occasions
d'entendre Barney au soprano... C'est Daniel Filipacchi, alors directeur
artistique «jazz» chez RCA, qui avait choisi la photo de la pochette et
le titre de l'album... Etant donné tout ce qui avait été enregistré, -
je tenais à conserver une trace de cette formation, - ce disque aurait pu
avoir une « suite », mais les ventes ne furent pas satisfaisantes, je
crois même qu'on n'avait pas réussi à couvrir l'avance qui nous avait
été accordée...» Barney Wilen aujourd'hui est parti, nous laissant, entre autres
messages «Tentons donc d'attraper les étoiles, et de ne pas devenir une
statistique de plus dans la liste honteuse des civilisations déchues. Le
jazz est notre véhicule. . . » Philippe Carles (Jazz Magazine) Février 1997 Barney Wilen Discography 1957 - 1962 Barney Wilen Discography 1962 -1990 Barney Wilen Discography 1990
-2003
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Variations sur
la note blue
Wilen pour de vrai
Le blues du
Saxo
Jazz Hot numéro
122. Juin 1957. Little Junior Parker - jimmy Guiffre - Barney Wilen
- Ernie Freeman - Concert Count Basie - Joe Williams - Bill Harris -
Raymond Beau.
This auction is for the June 1957
issue of JAZZ HOT - a French jazz monthly not to be confused
with JAZZ MAGAZINE. This issue has a nice b/w photo of CLIFFORD
BROWN on the front cover. Also Little Junior Parker, Jimmy
Giuffre, Barney Wilen, Gerry Mulligan, Ernie Freeman, and more.
Crammed with great photos of jazz legends, great advertisements,
album reviews, concert reviews, and other important information.
Measures approx. 215 x 270 mm (approx. 8 1/2" x 10 3/4” inches)
- 44 pages with text in French.
This auction is for the May 1959
issue of JAZZ HOT - a French jazz monthly not to be confused
with JAZZ MAGAZINE. This issue has a nice b/w photo of Barney
Wilen, Paul Rovere, Duke Jordan, Kenny Dorham and Kenny Clarke
on the front cover. Also Lester Young (9 pages - nice!), and a
fabulous 5-page Thelonious Monk interview! VERY NICE ISSUE.
Crammed with great photos of jazz legends, great advertisements,
album reviews, concert reviews, and other important information.
Measures approx. 215 x 270 mm (approx. 8 1/2" x 10 3/4” inches)
- 40 pages with text in French.
For
several months everyone had been waiting for this record. Its
release was to be an important date in Barney Wilen's career.
" Barney's first big album and under his name, you dig?
", people were saying on rue Saint-Benoît (the address of
the Club Saint-Germain, where the album was recorded). It's true
that we spoke a lot about this anthology before its release :
Barney Wilen, who is, at the age of 23, a saxophonist known
worldwide (the entire specialized press, from Europe to the two
Americas, has written articles about him), had recorded, on the
sunniest days of April 1959 (the 24th and 25th), a few magnetic
tapes with two compatriots and two "Americans in Paris
". The composition of the group was not the result of a
compromise with fate, but a defined choice made possible by
circumstances : combining Duke Jordan (piano), Paul Rovère (bass)
and Daniel Humair (drums), we had built a rhythmic section with an
amazingly young spirit, capable of creating the most favorable
climate for Barney. By giving him Kenny Dorham (trumpet) as
partner, we were giving him an illustrious companion, a sort of
crowned godfather, whose presence alone gave a new nobility to the
godchild. Raymond
Mouly (original liner notes, 1960) adapted from the French by
Isaac Saint Mire. "I
had proposed to Sonny Rollins to play in Other
film makers had immediately thought of repeating the experience.
Passionate about both jazz and movies, familiar with both fields,
which often mixed on certain nights at the Club Saint-Germain,
Marcel Romano, catalyst of countless events in the world ofjazz,
for which the rue Saint-Benoit was one of the centers, imposed
himself as the ideal go-between. "Edouard
Moulinaro, who was finishing Un Temoin Dans La Ville and had
ppreciated the
work of Miles Davis on Louis Malle's film, had asked me if the
trumpeter would accept to do another sound-track. But Miles was
onto something else, he had other projects, a new group to which
he was attached - maybe if the music could have been recorded in
Barney Wilen
French Ballads (1987; IDA). A straight-ahead
and even unambitious quartet album with Michel Graillier, this
featured exclusively French-written popular songs of the past.
Only the internationally known "Autumn Leaves" is a little
disappointing. Jazz the rough
guides
JAZZ MAGAZINE n°
67 de février 1961. Cher frère jazz (courrier), Où jouent-ils?,
Flashes, Informations, Disques du mois... et articles sur Barney
Wilen, Trente ans de cinéma, Paris blues by night (photos de
J.P. Charbonnier) Photos de J.P. Leloir, J.P. Charbonnier..
BARNEY WILEN
This b/w picture was
taken in Milano (ITALY) by Riccardo
Schwamenthal. The photo, unframed, measures
cm. 17,50 x cm. 24,00 (about inches 7,00 x 9,50)
The picture is signed overleaf by the author.
BIOGRAPHY OF BARNEY
WILEN March 4, 1937 - May
25, 1996 Bernard Jean Wilen,
AKA Barney was born March 4, 1937. Wilen was a self taught player
and became one of Europe's best and more modern saxophonists. He was
born in Nice to a French mother and an American father.He studied
the alto and, at 16, moved to Paris where he played with Henry
Renaud, Bobby Jaspar and Jimmy Gourley He grew up mostly on the French Riviera; the family left during World War II but returned upon its conclusion. According to Wilen
himself, he was convinced to become a musician by his mother's
friend, the poet Blaise Cendrars. As a teenager he started a youth jazz club in Nice, where he played
often. He moved to Paris in the mid-'50s and worked with such American musicians as Bud Powell, Benny
Golson, Miles Davis, and J.J. Johnson at the Club St. Germain.
He was very fortunate to tour and
record with Miles Davis in 1957. This led to him performing on the
soundtrack to the Louis Malle film "Lift to the Scaffold"
in 1957. The recording won the Prix Louis Delluc the next year.Two years
later, he performed with Art Blakey and Thelonious Monk on the soundtrack to Roger Vadim's Les Liaisons Dangereuses (1960).
He appeared
at the 1959 Newport Jazz Festival, one of the first non-americans to
do so. During the '60s,Wilen explored with free jazz and Indian
music. He appeared at the 1967 Berlin Festival and engineered Archie
Shepp's 1969 live performance at the Algiers Festival. In the late
70's and 80's he returned to playing the ballads of his influences
Sonny Rollins and Harold Land leading to him being awarded the Grand
Prix Charles Cros in 1987. In the 90's he continued to be active,
playing at many european summer jazz festivals and recording. He
died of cancer May 25, 1996 in Paris, France. Much of Wilen's later work was documented on the Japanese Venus label. Bibliography CHRONOLOGY Born, Nice, France
March 4, 1937 Moves to Arizona 1937 Retuns to Nice 1947 INR Broadcast with Henri Renaud,
Brussels November 4, 1954 Records with Jay Cameron, Paris
January 19, 1955 Records with John Lewis, Paris
December 4 and 7, 1956 Appears with Bud Powell, Paris 1957 Records "Tilt" as a Leader,
Paris January 7, 1957 Records "Barney Wilen
Quartet/Quintet" as a Leader, Paris Spring 1957 Appeared at San Remo
Jazz Festival 1956 Records with Roy
Haynes, Paris October 26, 1954 Tours Europe with Miles Davis 1957 Records with Miles Davis, France
November 30, 1957 Berlin Jazz Festival
appearance 1967 Engineer’s for
Archie Shepp at Algier’s Jazz Festival 1969 Records Lift to the
Scaffold with Miles Davis December 4-5, 1957 Performs, and is
broadcast with Miles Davis, Amsterdam December 8, 1957 Broadcast with Miles Davis, Paris
November 30, 1957 Records with Martial Solal, Paris
1958 Records with Milt Jackson , Paris
February 13 & 14, 1958 Records "Un temoin dans la
ville" as a Leader, Paris April, 1959 Records with Andy Bey, Paris April
15, 1959 Records with Kenny Dorham, Club
Saint-Germain, Paris April 24 & 25,1959 Records with Flavio Ambrosetti,
Lugano, June 27, 1959 Appeared at Newport
Jazz Festival with Toshiko Akiyoshi, July 4, 1959 Newport, USA Records with Art
Blakey, Paris July 28 & 29, 1959 Toured Europe with
Miles Davis 1959 Appears with Bud
Powell, Club St. Germain, Paris November 7, 1959 Appears with Bud
Powell, Club St. Germain, Paris December 5, 1959 Appears with Bud
Powell, Club St. Germain, Paris December 12, 1959 Records with Art
Blakey, Theatre Des Champs-Elysees, Paris December 18 & 19, 1959 Appears and records
with Bud Powell, Paris 1960 Records with Flavio
Ambrosetti, June 26 & 27, 1961 Records with Gil
Cuppini September 1 & 2, 1961 Records "Jazz Soundtrack From
Mental Cruelty" as a leader 1962 Records "Moshi"
1971 Nice J F appearance
with Stan Getz, Curtis Fuller 1970’s (late) Comic "Barney et la note bleue"
1986 a Suivre/Casterman Appears at opening of
Apollon Auditorium, Nice 1986
Appears with Martial
Solal at Cully Lavaux Jazz Festival March 23, 1991 Appears at Marciac
Jazz Festival, Marciac August 13, 1995 Appears at the Blue
Note October 17-22, 1994 Tours Japan and
appears at the Blue Note, Tokyo November, 1995 Appeared at the
Sunset, Paris (trio) April 5-6, 1996? Died, Paris May 25,
1996
Pierre Genty
Il y a un
peu plus de dix ans s’éteignait une figure insolite du
jazz français : Barney Wilen (1937-1996), saxophoniste à
la carrière particulièrement irrégulière et aventureuse,
dont l’œuvre polymorphe1 résiste aux
catégorisations stylistiques. C’est que sa musique,
extrêmement changeante, reflétant des influences très
diverses, semble constamment à la recherche de liens
entre différents courants musicaux et artistiques.
La carrière
de Barney Wilen se divise selon trois périodes :
1954-1961 où le saxophoniste réalise un parcours de
jeune musicien prodige, passant du lycéen niçois anonyme
à l'accompagnateur de Miles Davis et collaborant avec
des jazzmen majeurs ; après une disparition de cinq ans,
Wilen revient au devant de la scène de 1966 à 1971 où il
est un des animateurs les plus actifs des mouvements
d'avant-garde ; il disparaît une seconde fois pour
opérer un retour remarqué en 1986 avec la « Note Bleue »2
. Il se réoriente alors vers un jazz plus académique,
style dans lequel il continuera à jouer jusqu'à sa mort.
Indépendamment de ces trois périodes, l’œuvre de Barney
Wilen se développe autour de trois axes différents : une
partie que nous désignerons comme appartenant à
l’esthétique du jazz moderne, c’est-à-dire des
courants qui se sont épanouis durant les années
1940-1950 ; une partie expérimentale3
, par quoi nous indiquons les productions dans
lesquelles Wilen cherche à rompre avec les formes
traditionnelles du jazz, en participant notamment aux
groupes d’avant-garde ; enfin une partie associant
musique et image, à travers les collaborations de
Wilen avec des cinéastes et les créateurs d’une bande
dessinée.
Nous
décrirons tout d’abord la musique de Wilen, en
organisant notre travail selon ces trois axes. Dans une
seconde partie, notre réflexion se portera sur l’unité
de cette œuvre. Pour cela, nous nous intéresserons au
contexte dans lequel elle s’inscrit et à l’identité
culturelle complexe de son auteur, Barney Wilen,
musicien de jazz moderne français.
Si Wilen a
fait son apprentissage à l’alto, approché le baryton et
le soprano c’est néanmoins au ténor qu'il réalise ses
premières productions discographiques. À partir de 1959,
il alterne le ténor avec le soprano, moins souvent avec
l’alto, réutilisant épisodiquement le baryton, notamment
à la fin de sa vie.
C’est parce
qu’il est attiré par leurs couleurs propres que Wilen a
eu recours aux autres tessitures. Il est visible en
effet que sa démarche ne consiste pas à transposer son
jeu au ténor sur les autres supports mais plutôt à
exploiter les spécificités sonores des autres registres.
Son jeu au soprano, il est un des premiers jazzmen
post-bop à en avoir fait usage, est très clair, doux, «
féminin »4 selon ce qu’en affirmait Wilen
lui-même. On trouvera moins souvent Wilen à l’alto,
peut-être du fait de l’importance historique de Parker,
figure plus qu’intimidante pour les jazzmen de cette
époque. Lors d'un enregistrement réalisé en 1960 avec la
formation d'Art Blakey5 , on constate que
l'approche de l'alto chez Wilen est d’une étonnante
dureté, marquée par une sonorité rude et agressive,
incisive.
Son choix
du ténor comme instrument principal est le résultat
d'une autre recherche. Wilen affirmait avoir adopté le
ténor parce que celui-ci représentait, pour lui, une «
solution intermédiaire »6 aux autres
tessitures. Le ténor serait devenu son instrument
principal non pour ses qualités sonores propres, non pas
parce que Wilen a sans doute un meilleur niveau
technique sur ce support mais en ce qu'il le considère
comme un instrument polyvalent, capable de rendre et de
synthétiser à lui seul les possibilités des autres
registres.
Si une
telle démarche ne s'impose pas de manière évidente pour
qui écoute Wilen au ténor, on peut néanmoins relever
deux caractéristiques qui sembleraient la confirmer.
D'une part, l'approche de Wilen au ténor, beaucoup plus
que sur les autres registres, a été l'objet d'une
évolution importante qui confirme une recherche
constante sur la sonorité. D’autre part, lorsque Wilen
exploite le registre supérieur du ténor il s’exprime
d’une manière qui rappelle son utilisation du soprano :
de façon plus chantante et avec une approche rythmique
plus libre (valeurs rythmiques longues, expression plus
legato et liberté par rapport au tempo)7 .
Cette
recherche d’un équilibre sonore, Wilen va l’étendre à
son héritage stylistique marqué principalement par les
figures des grands boppers et de Lester Young8.
Les débuts
du saxophoniste montrent une influence bop évidente. Dès
ses premiers enregistrements, Wilen s’impose à Paris
comme un des grands espoirs du jazz moderne. L’album «
Tilt »9 révèle un leader de vingt ans
s’exprimant avec une grande assurance grâce à une
sonorité puissante, un impressionnant niveau technique
et une improvisation mélodique audacieuse. Le répertoire
emprunte volontiers au jazz moderne (Blue Monk)
et aux standards du be-bop (A Night in Tunisia et
Hackensack). On retrouve également l'influence du
be-bop à travers une certaine agitation rythmique
(fréquents doublements de tempo, alternance de croches
et de triolets), l’utilisation de dissonances et un
discours heurté marqué par une logique d’opposition
entre les phrases. Néanmoins, Wilen donne l'impression
de maîtriser parfaitement son expression, il se refuse à
toute exubérance, ne semble pas connaître d'hésitation.
Malgré son jeune âge il montre déjà une préoccupation
très lesterienne pour la justesse et l'équilibre.
Wilen va
peu à peu abandonner la rudesse de sa première approche
et s’orienter vers une forme de souplesse mélodique
caractérisée par un rythme flottant et la recherche d’un
discours plus homogène. Sa sonorité aussi change,
s'adoucit, son vibrato devient plus léger, le son
s'accompagne d’un très léger souffle, un peu à la
manière de Stan Getz. C’est le type de sonorité
qu’adopte définitivement Wilen, on la perçoit même dans
les productions de tendance free où elle se manifeste en
dehors des passages de violence expressive et de
hurlements.
L’association entre le be-bop et le courant lesterien
trouve son équilibre lors de la troisième période. Pour
résumer, on pourrait avancer que Wilen est lesterien
dans sa sonorité et sa construction rythmique, bop dans
son approche harmonique. Wilen se dirige vers une forme
de sophistication sonore et mélodique qui trouve dans
les ballades un lieu d’expression idéal.
La seconde
période de Barney Wilen se caractérise par un certain
nombre d'expériences musicales qui s'organisent selon
deux directions : celle d'une fusion entre le jazz et
certaines musiques traditionnelles (« Jazz Meets
India »10 , « Dear Prof. Leary »11
), celle de l'association musique – bande sonore
(« Autojazz »12 , « Le Grand Cirque »13
et « Moshi »14 ).
À la
première catégorie appartient un des disques les plus
importants du saxophoniste, « Dear Prof. Leary », né
dans le contexte de mai 1968. Au début de cette année,
Barney Wilen fonde le Free Rock Group qui, comme
son nom l'indique, se destine à une fusion entre rock et
free jazz. Il s'agit d'une formation très souple dont la
composition, des musiciens européens principalement, se
renouvelle constamment. En juin 1968, le Free Rock
Group enregistre « Dear Prof. Leary ».
Le disque
est construit selon une formule novatrice : on oppose un
trio rock comprenant Mimi Lorenzini (guitare), Günter
Lenz (basse) et Wolfgang Paap (batterie) à un trio jazz
composé d’Aldo Romano (batterie), Barney Wilen (saxophone
ténor et soprano) et Joachim Kühn (piano et orgue)
chacun disposant d'un des canaux de la stéréophonie. On
retrouve peu d’éléments du jazz, le bassiste,
d’obédience rock, ne réalise pas de walking bass, la
rythmique est constituée de riffs, Wilen alterne un
phrasé qui n’a rien du jazz et des improvisations libres.
Chez Kühn, la référence au free jazz réside dans des
improvisations apparemment sans contrainte dans
lesquelles l’expression se libère. Le répertoire fait
également référence à deux univers : morceaux des
Beatles ou d’Otis Redding alternant avec des
compositions d'Ornette Coleman.
Même si le
résultat sonore semble parfois surchargé, il faut
reconnaître à Wilen l'originalité voire l'audace de sa
démarche. En effet, le Free Rock Group est une
des premières formations à proposer une synthèse entre
le jazz et le rock et son utilisation de la stéréophonie
est très innovante.
C’est
également lors de cette période que se manifeste
l’intérêt de Wilen pour les possibilités offertes par
l’utilisation de la bande magnétique, le saxophoniste
cherchant à incorporer des sons et des bruits dont il a
réalisé lui-même les enregistrements.
Le long
voyage de Barney Wilen en Afrique, de début 1969 à fin
1970, a été une des étapes marquantes de sa carrière et
de sa vie. Durant ce trajet, entrepris dans le contexte
idéologique et mystique de la fin des années 1960,
Barney Wilen va enregistrer la musique de plusieurs
peuples de l’Afrique saharienne (Algériens, Peuls du
Niger, Maliens).
De retour à
Paris il réalise « Moshi »15 en compagnie
notamment de deux de ses compagnons de route, Didier
Léon et la très charismatique Caroline de Bendern. Ce
disque associe une musique de tendance pop-rock au
contenu des bandes sonores collectées en Afrique.
Dans «
Autojazz » et le « Grand Cirque », Wilen utilise
également la bande magnétique mais celle-ci évoque un
contexte parfaitement différent : celui du 25e
Grand prix de Monaco qui fut marqué par l’accident
mortel du célèbre pilote Lorenzo Bandini16.
Wilen, qui réalisait des prises sonores du Grand Prix,
est témoin de l’accident. À la suite de cet événement,
il organise une série de manifestations qui associeront
musique, bruits et projections vidéos de la course et
qu'il intitule « Le destin tragique de Lorenzo Bandini
». Il enregistre « Autojazz » le 13 février 1968 et « Le
Grand Cirque » en 1993 lors de sa troisième période.
Les deux
disques sont construits selon cinq parties. Dans «
Autojazz », chaque titre fait référence à un moment
particulier de la course : Expectancy (attente),
Start, Tribune Princière, Hairpin (que l'on
pourrait traduire par « virage en épingle à cheveux »)
et Canyon Sound and Bandini's Destiny.
Dans « Le
Grand Cirque » la musique est d’inspiration jazz-rock
même si certains passages du disque font entendre des
séquences d'improvisation libre. La forme se résume
visiblement à la mise en place des introductions et des
expositions de thèmes, l'ordre des improvisations et
leur durée ne donnant pas l'impression d'avoir été
définis au préalable et les interventions de la bande
sonore étant apparemment aléatoires.
Dans les
deux cas, « Moshi » et « Le Grand Cirque », Wilen a
recours à la bande sonore moins pour ses possibilités
techniques (boucles, effets sonores) que pour ce qu’elle
contient. Il procède ainsi de deux manières : soit dans
une optique purement musicale, en faisant de la bande
sonore un membre de l’orchestre ou en recherchant, dans
cette association, une couleur sonore particulière ;
soit en se servant du contenu de la bande pour ajouter
une dimension extra-musicale au travail des musiciens.
On
rencontre la première approche dans « Moshi » où la
bande sert d’introduction à la formation pour
disparaître peu à peu (Moshi ou Chechaoun),
dans 14 temps ou Tindy Abalessa on assiste à une
tentative d’interaction (guitariste cherchant à
instaurer un dialogue virtuel avec des chants de femmes).
De même, il est possible qu’« Autojazz » et « Le Grand
Cirque » furent les lieux d’une expérimentation sonore.
« Autojazz
», à l’origine projet associant musique, bruits et
vidéos de la course, semble davantage lié à la seconde
approche. Il existe une progression dramatique dans ce
disque qui est organisé selon différentes étapes de la
course et respecte l’ordre chronologique mais sans que
le moment de l’accident puisse être clairement identifié.
En cela Wilen parvient à maintenir une tension qui n'est
pas produite par la dimension musicale ni par l'aspect
acoustique de la bande sonore mais par un élément
narratif auquel cette dernière renvoie. Cette
incertitude se manifeste également dans les rappels
aléatoires de la course, la forme libre qui concourt à
une impression de hasard et qui évoque l’incertitude,
voire l’accidentel.
Il convient
de ne pas négliger le très fort potentiel évocateur de
la bande sonore dans « Moshi », qui, du reste, est aussi
la trace sonore d'un voyage qui a profondément marqué
Wilen. Il semble que l’utilisation de la bande sonore
soit d'abord motivée par une tentative de réunion entre
la dimension musicale et une dimension narrative ou
mystique avant d'être une recherche sonore, laquelle par
ailleurs s'impose nécessairement.
Cette
tentative de réunion avec une dimension extra musicale
se traduit également dans la collaboration de Wilen avec
le cinéma et, de manière plus inattendue, avec la bande
dessinée.
Un des
passages remarqués de la carrière de Wilen est sa
participation à la bande sonore d’« Ascenseur pour
l’échafaud »17 . C’est paradoxalement une des
réalisations pour lesquelles il a été le moins actif. Le
disque révèle avant tout la puissance créatrice d’un
Miles Davis. Alors âgé de vingt ans, Barney Wilen, sans
doute intimidé par l’envergure de son aîné, fait preuve
de la plus grande discrétion et se limite à un rôle
d’accompagnateur. On retient également sa participation
au sein des Jazz Messengers à la bande-son des
« Liaisons dangereuses »18.
Dans ses
réalisations pour le cinéma, Wilen procède de manière
assez conventionnelle, sa démarche consistant avant tout
à donner une illustration sonore à l’image. Dans le cas
d’« Un témoin dans la ville »19, il cherche à
reproduire musicalement les ambiances et les situations
du film : il prend un ton mélancolique pour accompagner
des chauffeurs de taxi attendant les derniers clients
d’une boîte de strip-tease, imite les sirènes des
véhicules de police ou adopte un rythme heurté pour
faire référence à une poursuite de voiture. Dans « Le
cœur fantôme »20 de Philippe Garrel la
musique sert de transition entre des scènes et apparaît
lorsque les personnages ne parlent pas. L’association
musique image est judicieusement utilisée lors d’une
séquence qui montre un peintre réalisant un tableau.
Durant toute la durée du travail on entend le saxophone
de Wilen improviser librement. Comme le peintre qui
construit avec incertitude, Wilen poursuit différentes
idées musicales, hésite, abandonne certains motifs,
cherche à en développer d’autres.
Le cinéma
n'est pas la seule collaboration de Wilen avec les arts
visuels, ce dernier est un des premiers sinon
l'initiateur d'un genre tout à fait inédit, et sans
descendance, qui associe musique et bande dessinée.
En 1984,
alors qu'il a presque totalement disparu de la scène du
jazz, Barney Wilen découvre une bande dessinée dont le
personnage présente des points communs troublants avec
son apparence physique et sa biographie. Après avoir
pris contact avec les auteurs de l'ouvrage, il réunit
des musiciens et enregistre un album qui porte le même
titre que la bande dessinée : « La Note Bleue ». Le
disque rencontre un immense succès puisqu'il est vendu à
près de 60 000 exemplaires ce qui est tout à fait
exceptionnel pour un disque de jazz en France.
L’entreprise de la « Note Bleue » est originale car
l'association bande dessinée et musique ne trouve pas ou
peu d’antécédents. Une telle association pose
nécessairement de nombreux problèmes par rapport à la
prise en compte de paramètres complexes et, a priori,
contradictoires, principalement sur la notion de durée,
celle objective du morceau, celle subjective de la
lecture. De plus, l'interaction ne peut agir que dans le
sens musique - dessin dans la mesure où le projet
musical s’est greffé sur un matériau visuel déjà achevé
et qui a été conçu sans le projet d’une telle
association.
La bande
dessinée s’organise en treize chapitres ou treize
épisodes dont les titres sont, les plages 2 et 6
exceptées, les mêmes que les treize premiers morceaux du
disque. Il existe certains liens entre la musique et
l’image : un orchestre de bal dans Triste Again,
la formation de Wilen improvise incongrûment un twist,
on réutilise le thème original d’une série policière
pour répondre à l’ambiance de polard dans Harlem
Nocturne et, plus littéralement, lorsque les
musiciens fictifs oublient d’accompagner le soliste dont
ils sont surpris par la présence, le vrai Barney Wilen
réalise seul un Besame Mucho.
Il apparaît
ainsi que le rapport de la musique à l'image se limite
au clin d’œil ou à la vague interprétation musicale des
atmosphères de la bande dessinée et qu'elle ne propose
pas une véritable solution au problème de la
synchronisation lecture / écoute. Au demeurant, ces
rapports sont peu nombreux les autres titres ne
présentant pas de liens pertinents avec la bande
dessinée. On peut donc émettre des réserves sur la
nécessité de ce disque, sinon qu’il a permis un retour
opportun de Barney Wilen sur la scène du jazz.
Nous avons
présenté l’œuvre de Barney Wilen en y distinguant trois
périodes (une période bop (1953-1961), une période
expérimentale (1966-1971) et une période plutôt
académique débutant au début des années 1980) et trois
axes esthétiques (jazz moderne, expériences et
combinaisons, rapport musique et image). De telles
divisions ont pour avantage de présenter de manière
pratique l’œuvre de Wilen mais n’en explique pas
l’hétérogénéité ; elles soulignent, au contraire,
l’impossibilité de circonscrire sa musique à un courant
précis. Le contexte dans lequel cette œuvre prend place
peut nous éclairer sur son unité.
On sait que
les concerts de jazz, en France, n’ont pas cessé pendant
l’Occupation et qu’il a même existé un regain d’intérêt
pour cette musique21. Cependant, si on
s’intéresse au jazz de cette époque, on n’y trouve aucun
germe de la modernité qui s’épanouissait alors de
l’autre côté de l’Atlantique à travers les figures de
Charlie Parker et Dizzy Gillespie. De fait, lorsque les
premiers disques de bop arrivent en France c’est un
bouleversement pour la vie du jazz français qui n’avait
alors absolument pas prévu une telle évolution. Aux
débats passionnés que le be-bop va susciter dans la
communauté des amateurs de jazz s’ajoute la vague de
redécouverte du style Nouvelle-Orléans qui avait débuté
avant-guerre de sorte qu’à partir de la fin des années
1940, le jazz va se scinder de plus en plus nettement
entre anciens et modernes.
L’émergence
d’un jazz moderne en France va être précédée d’une phase
nécessaire d’assimilation aux nouvelles approches du
be-bop. Le fossé est tel qu’on pourrait affirmer que les
musiciens français vont réapprendre le jazz. C’est par
le disque que les premiers jazzmen modernes français
comme Hubert Fol ou Jean-Claude Fohrenbach vont
s’initier au nouveau langage mais également lors des
tournées de jazzmen américains, lesquels vont être
l’objet de la plus grande attention. Un bopper comme
Kenny Clarke qui résidera à Paris de 1948 à 1951 et se
produira régulièrement au Club saint-Germain avec
notamment Pierre Michelot ou René Urtreger, va jouer un
rôle formateur stratégique pour la nouvelle génération.
Il est par ailleurs caractéristique que le batteur
américain, tout comme Don Byas, découvrant le continent
européen lors d'une tournée après la guerre, vont s'y
installer quelques années plus tard comme professeurs.
Barney
Wilen va succéder à cette génération de pionniers et
symboliser malgré lui, parmi d’autres, un jazz français
parvenu enfin à une certaine autonomie, capable tout du
moins d’évoluer sans la tutelle des jazzmen américains.
Cependant, c’est précisément cette image de jazzman
prodige, grand espoir du jazz en France, collaborant
avec Miles Davis en 1957, que Barney Wilen va chercher à
fuir, pressentant que sa créativité ne pourra réellement
s’épanouir dans le domaine strictement jazzistique.
Wilen
justifiera son retrait de la scène de 1961 à 1965 par la
nécessité de « faire le point » se sentant emprisonné
dans l’esthétique du be-bop22. En 1972,
lorsqu’il revient d’Afrique, Wilen affirme que,
contrairement à un jazzman américain, il a lui pour
avantage de bénéficier d’une plus large ouverture
culturelle : « je suis francophone et anglophone… On
pourrait aussi trouver étonnant que j’ai joué du jazz,
que Michel Roques et Michel Portal fassent du jazz… Les
musiciens américains n’ont sans doute pas eu autant de
chance que moi. »23 Nous comprendrons ainsi
: le fait que je sois jazzman et français n’est pas un
inconvénient, ce n’est pas forcément habiter dans la
périphérie du jazz, c’est au contraire posséder une
culture beaucoup plus riche et diverse que le musicien
de tradition rigoureusement jazzistique. Vingt ans plus
tard, alors qu’il est revenu vers une esthétique
beaucoup plus conventionnelle, Wilen, présentant Les
feuilles mortes lors d’un concert au Japon, se fait
l’ambassadeur de bon goût d’un certain répertoire
jazzistique français : « on m’a dit : "tu sais petit,
la chanson française se prête pas au jazz." Et donc nous
sommes là ce soir pour vous prouver le contraire.24
»
Cette
anecdote nous révèle, chez Wilen, le désir, parfois
opportun, de construire une musique qui ne puisse être
univoquement définie comme jazz, musique dont la
tradition est ailleurs. Pour y parvenir, la démarche de
Wilen consistera principalement à confronter son
expérience de jazzman avec des éléments non jazzistiques.
On ne trouvera finalement que peu de tentatives dans
lesquelles Wilen cherche à s’engager dans une direction
totalement nouvelle.
Ainsi,
derrière l’aspect hétérogène de l’œuvre du saxophoniste
et les revirements qui parcourent sa carrière, c’est une
recherche synthétique constante qui se manifeste à la
fois dans ses choix instrumentaux et stylistiques mais
également dans des tentatives de métissage (entre des
musiques différentes) et de combinaisons (entre image et
son, entre son et bruit).
Nous avons
relevé trois niveaux de synthèse.
Une
Synthèse entre les styles : le style de Wilen
tend à associer certaines particularités du jazz be-bop
et certaines du style lesterien, ainsi que du blues.
Chez Wilen, les influences jazzistiques ne jouent pas un
rôle didactique, qui servent à son apprentissage de
musicien et qu’il dépasse, mais plutôt un rôle
véritablement constitutif : c’est dans leur combinaison
que Wilen trouve sa singularité. Son choix du saxophone
ténor montre à quel point la démarche synthétique est
importante chez lui.
Synthèse entre les musiques : à plusieurs
reprises, Wilen tentera des associations entre jazz,
rock, musiques ethniques, répertoire de chansons
populaires françaises, thèmes de musique classique.
Synthèse entre les arts : à travers ses
collaborations avec le cinéma, la bande dessinée et le
théâtre.
Pierre
Genty |