2.5. Des
expos dans le monde entier - Entretien avec Loustal
Entretien téléphonique réalisé avec Jacques de Loustal, le 21
mars 2011.
Les passages introduits par la mention « PLD : » sont de
l’auteur de ce mémoire.[Pierre-Laurent Daures (PiLau)]
Les passages introduits par la mention « JdL : » sont de Jacques
de Loustal.
PLD : Pouvez vous me parler des expositions de l’AFAA pour
lesquelles vous étiez sollicité ?
JdL : Il y a eu une grosse expo, en 92, où l’idée était
d’exposer douze dessinateurs, un par mois et de faire des
expositions dans de nombreux instituts français en montrant une
expo plus précise d’un des douze, accompagnée d’une expo des
onze autres, avec cinq ou six pièces de chacun. On a pas mal
voyagé comme ça, effectivement. C’était un truc d’assez grande
envergure, parce que c’était des originaux, donc il y avait des
transferts des œuvres. C’était vraiment la grande époque de
l’AFAA où ils promouvaient beaucoup l’illustration […] C’est
vrai que dans tous ces centres culturels, il y avait un assez
bon accueil de l’illustration, de la bande dessinée, enfin du
mode narratif, comme vecteur de la langue française […]
PLD : Dans ce cadre, quel était votre rôle d’auteur-dessinateur
?
JdL : Présentation de l’expo, une petite conférence sur la bande
dessinée, sur mon expérience, des échanges avec la presse… C’est
des choses que j’ai beaucoup continué à faire, mais à titre
individuel, dans les instituts français. Là, en novembre j’étais
à Tokyo et à Kyoto où là aussi, je fais des expos, mais j’ai
depuis peu proposé autre chose : des résidences. Ce sont des
séjours que je fais, d’une quinzaine de jours sur place, je
dessine beaucoup, et j’expose les dessins que j’ai faits, la
veille de mon départ. Mais c’est plus du dessin fait sur place,
du dessin de voyage, que de la bande dessinée.
PLD : C’est une autre forme d’exposition qui s’apparente plus à
la conclusion d’une séquence de création qu’à une rétrospective
sur une œuvre passée.
JdL : Oui, mais évidemment, en accompagnement de ces résidences,
il y a forcément une petite expo qui a lieu dans les
médiathèques ou les instituts français ou des choses comme ça.
PLD : Sur ces résidences, qui est commanditaire, Cultures France
?
JdL : Non, parce que dans
les années 90, 2000, il y avait des énormes budgets du côté de
l’AFAA, mais maintenant, il n’y a plus une thune, donc ce sont
les instituts qui me font venir ; ils se débrouillent avec des
budgets locaux, et des partenaires Enjeux et stratégie de
l’exposition de bande dessinée Annexes 99 locaux. Par exemple au
Japon, une partie de mon voyage était payé par les universités
parce qu’ils faisaient des petites conférences ou des workshops,
des trucs comme ça. J’ai fait ça aussi à Essaouira il n’y a pas
très longtemps, où c’était combiné avec des partenaires de
l’Alliance Française sur place. Quand je fais des déplacements,
ce n’est plus du tout dans les mêmes conditions. L’AFAA
n’intervient pas, et du coup, il n’y a plus le budget pour faire
des vraies expos, c'est-à-dire avec un transporteur, avec un
budget d’assurance. La dernière très grosse expo que j’ai fait
comme ça, c’était une expo dans toute l’Amérique du sud, en
95-96, où j’avais fait plein de peintures, des croquis, des
choses comme ça, et qui était exposée dans les Alliances
d’Argentine, Chili, Equateur… Ça, c’était l’époque où il y avait
un transporteur spécial, des caisses spécialement réalisées à la
taille de mes peintures, qui étaient exposées au Musée des Beaux
Arts de Santiago. C’est une époque révolue, ce qui fait que
comme il y a beaucoup moins de budget, je propose des expos de
multiples : des lithos, des sérigraphies. Ça, je viens avec,
dans mes valises, avec un tube et il n’y a aucun problème
d’assurance. Ça permet de faire une expo, ça permet aussi de
bien occuper un espace, parce que c’est en général assez grand
et assez coloré. Maintenant, c’est un peu comme ça que ça se
passe : ça et les dessins que je fais sur place. Ça s’accompagne
d’une série de conférences. […]
PLD : En dehors de ces
résidences, vous avez fait l’objet de plusieurs expositions :
quels sont les enjeux d’une exposition de vos travaux ?
JdL : Les grosses expos, ça permet de faire des sortes de
rétrospectives, de montrer l’ensemble du travail, de montrer des
originaux. Moi personnellement, j’aime bien aller voir des expos
où il y a des documents originaux, comme celle d’Hugo Pratt en
ce moment à la Pinacothèque où il y a des pièces absolument
magnifiques. Bon, moi j’aime bien montrer ça. J’ai eu la
biennale de Cherbourg, il y a quelque temps, et là c’était un
vrai travail avec les commissaires d’exposition. En plus j’y ai
fait une résidence donc il y avait une création liée à cette
expo, une dizaine de grands fusains dans les bunkers de
Cherbourg. Là j’en ai une en préparation au Musée des Beaux Arts
de Mulhouse… A chaque fois qu’on me propose ça, je ne vois
vraiment pas de raisons de refuser : c’est une mise en valeur de
mon travail, c’est des choses qui ne sortent jamais de mon
atelier et que je montre. Evidemment, il y a la promotion, il y
a une vente de livres au moment de l’exposition, mais c’est
toujours très négligeable.
PLD : Donc c’est avant tout un plaisir ?
JdL : Tout dépend de la mise en valeur du travail et du lieu.
Evidemment quand ça me donne l’occasion d’aller voyager à
l’autre bout du monde, c’est encore mieux. Enjeux et stratégie
de l’exposition de bande dessinée Annexes 100 Mais quand c’est
dans un joli musée, quand c’est une expo qui dure plusieurs
mois… Là, je vais avoir une expo à Lucerne, au Fumetto, où tous
les ans, ils invitent un artiste en résidence. Donc je dois
faire un dessin par jour en passant dix jours là bas. Là il y a
un commissaire d’expo qui regarde ce que je fais et c’est lui
qui définit une identité à l’exposition en choisissant un
certain nombre de pièces et pas d’autres.
PLD : Comment se passe ce travail avec un commissaire d’expo ?
JdL : En général je le
laisse dans mon atelier, il regarde tout, il regarde ce qui
l’intéresse, il demande d’autres choses dans le même esprit.
PLD : vous vous impliquez dans la scénographie ?
JdL : Moi personnellement, je ne m’en occupe pas : ce n’est pas
mon travail, je ne connais pas les trucs… J’ai toujours
l’impression qu’il y a dix mille façons de les présenter alors
j’ai tendance à faire confiance et à arriver la veille du
vernissage […] PLD
: Qu’est ce qui vous paraît le plus propice à exposer, des
planches originales, des carnets, des dessins isolés…?
JdL : A mon avis, tout : les planches de bande dessinée, il y a
des gens qui aiment bien, surtout quand c’est de la couleur
directe ; il y a aussi tout un marché autour de l’illustration
[…] ; parfois je montre un peu du travail préparatoire, mais ça
c’est un type d’exposition un peu plus didactique ; et il y a
aussi les peintures, les grands formats. Moi j’essaie que les
expos aient une certaine cohérence : soit on montre
uniquement le travail de bande dessinée, soit on montre quelque
chose autour de la musique, soit on ne montre que les peintures,
ou que les fusains. Ou alors, si c’est très grand il faut faire
en sorte d’avoir des sections différentes pour chaque type de
pièce exposée.
PLD : Quel est le rapport qu’entretient l’exposition de bande
dessinée avec le livre ? Diriez vous qu’il s’agit de deux
facettes d’une même œuvre, de deux œuvres distinctes, d’une
œuvre principale déclinée dans une forme secondaire ?
JdL : C’est une déclinaison. Pour moi, ça n’a pas le même
intérêt qu’une expo où je présente des choses inédites qui ont
été faites pour un accrochage. C’est une sorte de lancement du
livre. Quand j’expose des planches originales d’un livre qui
vient de sortir, c’est dans l’idée de créer un petit évènement
autour de la sortie du livre, qui permette au gens de voir le
travail… Non, ce n’est pas une œuvre à part, c’est
une déclinaison, un bonus.
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