1996 MONSIEUR
PERSONNE
Monsieur Personne [Texte
imprimé] : roman / Robert Deleuse. - Paris : Métailié, 1996 - 120 p. :
couv. ill. en coul. Jacques de Loustal ; 22 cm. - (Collection Troubles).
Publisher: Diffusion Seuil; Troubles edition (1996)
Romans policiers
Littérature
Librairie
Langue Français
Language: French
ISBN: 2864242184
ISBN-10: 2864242184
ISBN-13: 978-2864242185
couverture: Barney et la note bleue
Frédéric Blondel se fait voler sa voiture dans un parking et va déclarer le
vol dans un commissariat. À partir de cet instant tout change dans sa vie,
personne ne le reconnaît, plus aucune donnée objective de son identité ne
fonctionne. Il ne sait plus où il en est et bascule dans un monde d'angoisse
et d'inconnu. Manipulation ou paranoïa ?
http://www.robertdeleuse.com/
MONSIEUR PERSONNE
Ecrit entre janvier et novembre 1995, 121 pages.
Publié aux éditions Anne-Marie Métailié, en février 1996.
Résumé : Frédéric Blondel se fait voler sa voiture dans un parking et va
déclarer le vol dans un commissariat. A partir de cet instant, tout change
dans sa vie, personne ne le reconnaît, aucune donnée objective de son
identité ne fonctionne. Il ne sait plus qui il est, où il en est, et bascule
dans un monde d’angoisse et d’inconnu. Est-il poursuivi par des assassins,
des policiers ? Pris dans un complot ou dans un cauchemar ? Manipulation ou
paranoïa ?
Réactions : « Lecteur à l’équilibre psychologique précaire s’abstenir :
Robert Deleuse vous entraîne à la suite d’un homme amené aux rives de la
folie. Une seule chose est certaine, et encore, c’est qu’il est au centre
d’une manipulation (par qui ? pour quoi ?) visant à l’utiliser pour éliminer
un homme politique gênant. Ce Monsieur Personne à l’identité fluctuante se
retrouve aux prises avec un cauchemar digne de la série Le Prisonnier… »
(Michel Guilloux, L’Humanité).
« Qui est Frédéric Blondel ? Est-il devenu fou ou amnésique ? Fait-il
l’objet d’une manipulation qui le dépasse ? A partir d’éléments quotidiens
ordinaires et a priori rassurants, Robert Deleuse construit un monde
inquiétant dans un huis-clos kafkaïen… » (Sans nom de critique, Var-Matin).
« Imaginez que l’on vous vole votre voiture dans un parking, que vous
portiez plainte, que la police vous demande votre identité et que vous ne
retrouviez plus votre portefeuille. Mais que la secrétaire de direction de
la boîte qui vous emploie ne vous reconnaisse pas, c’est un peu fort de café
! Et pourtant, c’est ce qui arrive à Monsieur Personne, un fabuleux suspense
que l’on doit à Robert Deleuse, déjà remarqué pour ses Chroniques d’une
ville exemplaire (chez Denoël) et son excellent A la poursuite de James
Hadley Chase(aux Presses de la Renaissance).. » (Gérard Oestreicher, Le
Républicain Lorrain).
« Frédéric Blondel se fait voler sa voiture, se retrouve avec une vie qui
n’est pas la sienne, un passé qui n’a rien à voir avec sa vie plutôt
tranquille. Robert Deleuse démarre sur les chapeaux de roue, tricote une
aventure avec faux et usage de faux et balance le tout en une centaine de
pages haletantes. Un rapide ce garçon, un malin aussi qui connait bien les
principes de la manipulation intellectuelle au profit des malfrats… » (Dinah
Brand, Lire).
« Noir sur noir, sans drôlerie – sauf à se demander si tout le roman n’est
pas qu’un seul et unique pied de nez – est le dernier ouvrage de Robert
Deleuse, Monsieur Personne. De quelle manipulation Frédéric Blondel (si
c’est bien lui) est-il le jouet ? La réponse de Robert Deleuse pousse le
bouchon assez loin (au-delà de la simple Raison d’Etat) et à petites touches
presque impressionnistes, il nous file une peur bleue de ce qui se trame
chez nos dirigeants… » (Patrick Coulomb, Le Méridional).
Historique : L’idée de ce roman m’est venue d’une nouvelle que j’avais
rédigée pour une revue. Cette nouvelle contait l’histoire d’un homme que le
décès (accidentel ou volontaire voire délictueux) d’un de ses contemporains
avait interpellé de façon suffisamment significative pour qu’il se mît à
fouiner sur cette mort qui finira par le rattraper. Du disparu en cause,
personne dans la ville ne connaissait quoi que ce soit. C’est de ce vide
qu’est née la projection de Monsieur Personne. A ceci près que ce serait mon
quidam lui-même qui ne saurait plus exactement qui il est tout en croyant
être quelqu’un de très précis. Toute la difficulté a consisté à retomber sur
mes pieds, ce qui était loin d’être gagné avec un personnage jeté dans un
tel précipice. Il me fallut donc, avant tout, trouver un décor immédiatement
identifiable, une progression narrative à la limite du commun, pour que la
banalité bascule dans l’extraordinaire. Une appréciation de Roger Nimier à
l’endroit de Kafka (même si Kafka n’a strictement rien à voir avec ce roman
!) a guidé mes pas tout au long de ce récit romanesque, lorsqu’il écrivit :
« Avec Kafka, le fantastique n’est plus un élément déroutant. Il devient
tout naturel. Il est ressenti de l’intérieur ». C’est ce que j’ai tenté de
faire et que je crois avoir plutôt réussi en retrouvant notamment cette
écriture concise, syncopée, efficace qui fonda, en partie, le succès
critique de mon premier roman… J’envoyai le manuscrit à deux éditeurs.
Verdier et Métailié. Le premier l’écarta. Anne-Marie Métailié me répondit
quatre semaines plus tard qu’elle publierait mon roman parce qu’elle
trouvait l’intrigue « excellente » et qu’il était « très bien écrit ».
Néanmoins, il faudrait que je consente à retravailler mon début et ma fin.
J’y consentis volontiers, profitant pour épurer quelques longueurs et
préciser quelques points que je trouvais moi-même obscurs. Le roman parut
courant février 1996… Le 16 mars, je recevais de l’ami Daniel Mauroc
(traducteur de l’anglais) un courrier dans lequel il notait : « Ton roman
m’a fasciné (…) parce qu’il rejoint pour moi, en découverte choc, ma lecture
récente de la Trilogie new-yorkaise de Paul Auster et celle d’un ancien
texte de Nathalie Sarraute. Ta technique est très différente, bien sûr, mais
elle traite des mêmes obsessions avec le même impact, les premières
procédant des mêmes ambiguïtés. ! Paradoxalement… ». Deux jours plus tard,
Claude Pujade-Renaud (Goncourt des lycéens 1994) me faisait observer : « Ce
qui est très remarquable, c’est ta construction et progression à partir de
l’apparente banalité. Ca, c’est du beau boulot qui fonctionne très bien… ».
Le 24 mars, François Bouchard (autre ami traducteur, de l’italien) me
confiait : « Tu sais admirablement détourner les thématiques propres à la
littérature savante pour les mettre au service d’une littérature populaire
(…). Toutefois, si tu te plais à avouer la référence à Kafka, il m’apparait
que c’est là une fausse piste. Je te vois plutôt dans l’univers
pirandellien. Et avec Pirandello, toute cette littérature de l’entre-deux
guerres sur le doute ontologique (…) et même le Mac Orlan du début, celui de
La Maison du retour écoeurant. Bref, un filon narratif qui n’utilise une
esthétique réaliste que pour mieux la subvertir… ». Georges-Olivier
Châteaureynaud (Prix Renaudot 1982) me fit parvenir ce simple mot : « Cher
Robert, merci de m’avoir jeté dans ce cauchemar ! Je te revaudrai ça d’une
façon ou d’une autre, talentueux salopard ! Amitié… ». Quant aux critiques
publics, ils furent tout aussi élogieux, à deux voix téléguidées près, au
nom (sans aucun doute) de la toujours saine respiration démocratique
exprimée par Julien Gracq…
Extrait : « (…). On devait en vouloir à Frédéric Blondel car le piège se
referma sur lui sans qu’il pût esquisser le moindre geste. Tout commença
dans le parking souterrain de la gare ferroviaire, quand il voulut récupérer
sa Clio. Après avoir erré un long moment dans les sous-sols, parcouru tous
les niveaux, il dut se rendre à l’évidence : la voiture avait disparu. Il ne
comprenait pas comment cela avait pu se passer puisqu’il détenait encore le
ticket de transit. Pourtant, cela s’était produit. Par acquis de conscience,
il hanta une dernière fois les vastes structures véhiculaires puis décida de
se rendre au guichet de contrôle situé près de l’ascenseur. L’employé avait
l’air harassé. De larges cernes noirs sous les yeux. Le visage légèrement
bouffi. Il leva sur lui un regard morne. Frédéric Blondel tenta de lui
décrire son problème du mieux qu’il put. Bafouilla. Se reprit. Le ton de sa
voix le surprit lui-même. Comme s’il avait du coton dans la bouche. A la
fin, l’employé arborait une expression encore plus lasse. Blondel, lui,
était carrément désemparé. Loin de le rasséréner, son explication avait fait
monter en lui une sorte d’inquiétude. Il se sentait tout à la fois ridicule
et coupable. Avec le vague sentiment qu’il aurait mieux fait de se taire. Ne
rien dire du tout. A personne. Prendre le premier train et rentrer chez lui.
En même temps, il ne pouvait s’empêcher de penser qu’il n’y avait aucune
raison, malgré ce doute, de ne pas divulguer sur-le-champ le vol de sa
voiture et que, de toute façon, il aurait bien fallu le faire à un moment ou
à un autre. Le policier qui aurait pris sa déposition lui aurait alors
demandé pourquoi il n’en avait pas informé le préposé au parking et il
n’était jamais bon que la police se pose des questions. Il suffisait déjà
qu’elle en pose. A la seule évocation du mot « police », la peur le secoua
de pied en cap sans qu’il fût à même d’en définir la cause exacte. Mais il
se dit qu’il devait en exister une pour qu’il en ressente à ce point les
effets. L’employé lui demanda son ticket. Frédéric Blondel le lui glissa par
l’ouverture en demi-lune qui avait été pratiquée au bas de la vitre de
protection en verre armé. L’homme au regard las consulta les données
imprimées par l’horodateur. Puis il tourna et retourna le ticket entre ses
doigts osseux avant de produire une moue désabusée. Frédéric Blondel eut
l’impression que la mimique de l’employé relevait davantage de la suspicion
que du désabusement. Mais ce n’était sans doute qu’une sensation passagère
imposée par le climat général de sa mésaventure. De toute manière, il
percevait mal comment l’employé aurait pu résoudre l’énigme de la voiture
disparue et a fortiori le suspecter de quoi que ce soit en manipulant un
simple ticket de parking. Il le vit d’ailleurs soulever son combiné
téléphonique, enfoncer une touche pour capter une ligne, composer un numéro
à deux chiffres et patienter en tapotant sans conviction l’arête du
rectangle de carton jaune et noir sur le plateau de la table. Après quelques
secondes, l’employé obtint son correspondant qui se prénommait Charles et à
qui il demanda de venir le rejoindre au bureau. Il raccrocha et se borna à
déclarer : « Quelqu’un va venir. Vous allez voir ça avec lui ». Frédéric
Blondel commit un vague signe de tête en direction de l’homme à l’air
harassé en se disant que c’était d’ores et déjà tout vu. Il avait accédé à
ce parking à 9h30 et, deux heures après environ, n’avait pu récupérer son
véhicule car celui-ci avait disparu. C’était aussi simple que bonjour et le
prénommé Charles ne changerait rien à l’affaire. Même s’il n’en laissa rien
paraître, la réponse de l’employé agaça suffisamment Frédéric Blondel pour
qu’il songe à s’éclipser. Il avait perdu assez de temps. Bien entendu, il
n’en fit rien. La démarche aurait pu sembler des plus suspectes. Par la
suite, si quelque chose advenait, on se souviendrait de l’étrange attitude
de ce client qui était venu porter réclamation pour s’esquiver aussitôt.
Peut-être même que quelque chose était déjà advenu… ».
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