2013 Bal masqué à Békéland
Raphaël Confiant
Caraïbes éditions
224 pages
12,80 euros
ISBN 9782917623404
Date de lancement 21 juin 2013
Couverture: Jacques de Loustal
Un polar irrésistible dans l'univers des Békés
de Martinique
A l'heure où l'on célèbre le centenaire de la naissance d'Aimé Césaire,
l'écrivain Raphaël Confiant publie un polar truculent, "Bal masqué à
Békéland" (Caraïbeditions), qui entraîne tambour battant le lecteur dans
l'univers très fermé des Békés, ces Blancs créoles de la Martinique.
Dans ce roman policier plein de rebondissements et d'intrigues
rocambolesques, la fille d'un richissime Béké, Marie-Aimée Dupin de Flessac,
disparaît après une fiesta organisée sur un îlet appartenant à sa famille.
Son père, à la tête d'une bananeraie et d'affaires variées en Amérique du
Sud, fait appel à Jack Teddyson, détective privé déjanté à l'humour
pince-sans-rire, pour retrouver sa trace. Pas question de prévenir la
police. Ce serait rendre publique la fugue de l'héritière. S'agit-il bien
d'ailleurs d'une fugue ? Ou d'un enlèvement par le groupuscule
indépendantiste "Béké dehors !" ? Ou encore d'un rapt lié au trafic de
drogue avec la Colombie ? L'enquête se révèlera complexe et le détective au
langage fleuri manquera parfois d'en perdre son créole.
"Dans ce bouquin, il y a des Békés salauds, des Békés normaux, des Békés
gentils"
La plupart des Békés vivent dans ce quartier du Cap-Est, au François, que la
population a surnommé "Békéland". "Ce n'est pas une charge contre les Békés,
tout le monde en prend pour son grade dans le roman ! Mais il ouvre une
porte sur ce monde méconnu, sa culture, son mode de vie. Ce sera une
découverte pour les lecteurs de l'Hexagone et même pour des Antillais",
assure Florent Charbonnier, un Franco-Canadien, patron de Caraïbéditions,
première maison à publier dès 2008 des BD comme "Tintin", "Astérix" ou
"Titeuf" en créole antillais et réunionnais. "Il ne s'agit pas d'une vision
caricaturale du monde Béké dont je rappelle qu'il fait partie de la société
martiniquaise, que nous le voulions ou non", renchérit Raphaël Confiant, né
en 1951 au Lorrain (Martinique). "Mais ce n'est pas parce qu'un Béké est
Martiniquais que cela abolit pour autant la lutte des classes !", ajoute
l'écrivain, cofondateur du Mouvement de la Créolité en 1989 et rédacteur du
premier dictionnaire du créole martiniquais. Universitaire, il est aussi
doyen de la faculté des lettres de l'Université Antilles-Guyane. Dans un
polar, dit-il, "j'écris de manière plus libre, je sens moins la pression de
la demande identitaire, le poids des réalités historiques".
Polar sur fonds de business religieux aux Antilles
Raphaël Constant a publié cinq livres en langue créole avant d'être révélé
au public français et international avec "Le Nègre et l'Amiral" (Grasset,
1988). Plusieurs fois primé, il est l'auteur de plus d'une quarantaine
d'ouvrages en langue française dont "La panse du chacal" en 2004 ou "Rue des
Syriens" en 2012. "Bal masqué à Békéland" est le troisième opus des
aventures de Jack Teddyson paru chez Caraïbéditions. Le premier polar de
Raphaël Confiant, "Citoyen au-dessus de tout soupçon...", sera publié début
2014 dans la collection Folio policier (Gallimard). Le deuxième se situait
chez les francs-maçons antillais et le prochain parlera du "business
religieux", de ces pasteurs auto-proclamés, mi-gourous, mi-escrocs, qui
pullulent aux Antilles.
Marie-Aimée Dupin de Flessac, héritière d’une
riche famille de Békés (Blancs créoles de la Martinique) a mystérieusement
disparu à la suite d’une fiesta organisée le soir du mercredi des cendres
sur un îlet appartenant à son père. Ce dernier, propriétaire d’une vaste
bananeraie et d’un magasin de bricolage ainsi que d’affaires diverses en
Amérique du Sud, fait appel à Jack Teddyson, le plus célèbre détective privé
de l’archipel des Antilles et de la Guyane. Fugue d’une jeune fille en
révolte contre son milieu? Enlèvement de celle-ci par le groupuscule
indépendantiste «Békés dehors!»? Affaire crapuleuse liée au trafic de drogue
qui sévit entre la Colombie et la Martinique, cette dernière servant
d’escale vers l’Europe? Teddyson sera amené à explorer une à une chacune de
ces pistes, pénétrant à cette occasion dans un univers qui lui est
totalement étranger, «Békéland», le bantoustan de luxe que s’est construit
l’aristocratie blanche créole dans le sud de la Martinique.
Comme à son habitude, le très déjanté Teddyson s’aidera du bon sens de la
compagne de ses jours, la très rustique Francelise, déterminée à se faire
épouser par lui; des tuyaux que lui donnera de temps à autre son grand ami
du commissariat central de Fort-de-France, l’inspecteur Maxence dit «Maxo»
pour les intimes; de sa rencontre avec Lucienne, adepte de l’Église
Universelle de la Rédemption Chrétienne, dont l’oncle, Ti Jo, docker de
profession, est le leader du groupuscule indépendantiste qui veut chasser
les Békés de l’île; de son éternelle amante, Mauricette, hôtesse de l’air
adepte de la chirurgie esthétique et de l’infidélité sentimentale. Et pour
la première fois, des indications cryptées de feu tonton Milo, l’oncle qui
lui a légué sa maison au quartier Bas-Calvaire. Le monde fermé des Békés
entrouvre ses portes à l’occasion de cette enquête menée tambour battant,
enquête pleine de rebondissements et de situations rocambolesques qui
tiennent le lecteur en haleine tout en le faisant sourire par moments,
Teddyson étant à sa manière un grand humoriste doublé d’un détective hors
pair.
Entrevue avec l'auteur
«Bal masqué à Békéland», la troisième aventure du détective Jack Teddyson
vient de sortir en librairie alors qu’on annonce le premier tome de ses
aventures («Citoyens au-dessus de tout soupçon») dans la collection poche
Folio policier. Quel succès! Pouvez-vous nous rappeler comment est née cette
aventure caribéenne?
R. CONFIANT: en fait, cette aventure a commencé et s’est arrêtée en 1997
lorsque feue Simone Gallimard m’avait proposé d’écrire un polar au éditions
Mercure de France. Ce que j’ai fait: il s’agit du «Meurtre du Samedi-Gloria»
paru en 1997. Mais je n’ai pas continué l’aventure car je ne me sentais pas
vraiment prêt pour aborder ce genre littéraire. Peut-être étais-je aussi
imbu de certains préjugés à son endroit... C’est Florent Charbonnier, le
patron de Caraibéditions, qui en 2010, très longtemps après donc, a réussi à
me convaincre de l’intérêt du polar pour décrire la réalité antillaise. De
nos conversations est né le personnage du détective Jack Teddyson, de son
vrai nom, Raymond Vauban, personnage déjanté qui compte plus sur sa
compagne, ses maîtresses ou ses amis, voire même sur le hasard, pour
parvenir à boucler ses enquêtes, même s’il n’est pas dépourvu de flair.
C’est le contraire du détective sûr de lui et qui mène ses enquêtes tambour
battant! Je ne pensais pas qu’il connaîtrait un tel succès et le fait que
Folio en ait acheté le tome 1 me réjouit puisque Folio c’est Gallimard et
que le Mercure de France est une branche de Gallimard. Cela prouve en tout
cas qu’un éditeur basé aux Antilles peut faire du bon travail et j’encourage
mes collègues écrivains à donner des textes à nos éditeurs locaux sans pour
autant négliger ceux de l’Hexagone.
Avant de parler de votre dernier polar, pouvez-vous nous décrire le
détective Jack Teddyson en quelques mots?
Comme je l’ai dit c’est un type un peu paumé, limite «loser», quand on
l’examine de prime abord, mais, de plus près c’est un pince-sans-rire et
quelqu’un qui tourne en dérision les mille et un travers de la société
martiniquaise. Il n’a aucun plan de carrière, aucune ambition dans la vie,
hormis celle de gérer son petit cabinet de détective privé au quartier
Bas-Calvaire, à Fort-de-France, mais régulièrement, de grosses affaires lui
sont confiées et il est obligé d’y faire face. Et là, Teddyson se révèle
pour ce qu’il est sans qu’il en soit vraiment conscient: un excentrique
génial.
L’enquête précédente se déroulait dans le milieu des Franc-Maçons Antillais,
avez-vous eu des retours des Loges de Guadeloupe ou de Martinique?
Non, pas des loges, mais de francs-maçons, oui. Mais toujours de manière
discrète, feutrée. C’est dans leur style, je crois. Ils m’ont tous dit que
ce bouquin reflétait une grande connaissance du milieu et des rituels
maçonniques et certains se sont demandés si je n’avais pas été informé par
des «frères», ce qui a leurs yeux constitue une trahison de leurs idéaux. Je
les ai vite détrompés! Je n’ai jamais mis les pieds dans un temple
maçonnique ni assisté à une cérémonie maçonnique, une «tenue» dans leur
langage. J’ai aussi très peu discuté avec des maçons avant de rédiger
l’ouvrage. Toutes mes informations proviennent de recherches en bibliothèque
et bien sûr de mon imagination!
«Bal masqué à Békéland», quel titre! Une intrigue martiniquaise parmi
d’autres ou la découverte d’un milieu peu connu et mystérieux?
Oui, le milieu béké est, comme chacun sait, le plus fermé de tous les
milieux martiniquais. La plupart des Békés vivent entre eux dans ce quartier
du Cap-Est, au François, que la population a surnommé «Békéland». Cet
endroit est perçu, à tort ou à raison, comme un bantoustan de luxe et lors
de la grève générale de février 2009, des appels avaient été lancés pour
l’investir, ce qui avait motivé l’envoi d’une compagnie de CRS afin de
protéger les lieux. Je n’ai jamais mis les pieds au Cap-EST, du moins, une
fois que les Békés se sont emparés du lieu. La seule fois où je mis suis
rendu, c’était juste avant, avec des militants de l’ASSAUPAMAR, afin
d’empêcher la destruction d’un endroit appelé Cap Salomon. Nous avons perdu
notre combat et depuis lors, les villas y ont poussé comme des champignons.
Que pouvez-vous dire de l’intrigue à nos lecteurs?
Je ne vais tout de même pas déflorer l’intrigue! Disons que la fille d’un
richissime Béké, Marie-Aimée Dupin de Flessac a disparu et que son père,
propriétaire d’une bananeraie et d’un magasin de bricolage, fait appel au
détective privé Jack Teddyson pour retrouver sa trace car faire appel à la
police serait révéler cette fugue sur la place publique. Mais en fait
s’agit-il bien d’une fugue? Ou alors d’un enlèvement par le groupuscule
indépendantiste «Béké dehors!» qui veut expulser les Békés de la Martinique?
Ou encore d’un kidnapping lié à un trafic de drogue avec la Colombie? Je
laisse le lecteur le découvrir...
Comment pensez-vous que la communauté békée réagira à la sortie de ce polar?
Écoutez, je ne suis pas dans la tête des Békés et puis tous les Békés ne
vivent pas au cap-Est, loin de là! En tout cas, dans ce bouquin, il y a des
Békés salauds, des Békés normaux, des Békés gentils etc... Il ne s’agit pas
du tout d’une vision caricaturale du monde Béké dont je rappelle qu’il fait
partie de la société martiniquaise que nous le voulions ou non. Mais ce
n’est pas parce qu’un Béké est un Martiniquais que cela abolit pour autant
la lutte des classes! C’est là ma divergence fondamentale avec l’association
«Tous Créoles». Daussault, tout comme l’ouvrier qui bosse dans son usine,
sont bien français tous les deux, ça n’empêche pas l’ouvrier de lutter
contre son patron. Donc reconnaître que les Békés sont des Martiniquais ne
signifie absolument pas cesser immédiatement de lutter contre ceux qui parmi
eux sont des exploiteurs. Bien au contraire! C’est même parce qu’ils sont
des Martiniquais qu’il faut être plus sévère envers eux qu’envers des
patrons étrangers.
La littérature ou certaines œuvres peuvent servir d’étendard à une cause
sociétale, est-ce le cas de ce roman policier?
Traditionnellement, le polar reflète le côté obscur de la société. Il en
révèle la face cachée, les turpitudes mais à sa manière propre. Avec ses
propres codes! Son propre style aussi. Mes polars s’inscrivent dans le droit
fil de la cause que j’ai toujours défendue: celle de la Créolité.
De façon générale, le genre «roman policier» permet-il d’aborder des sujets
difficiles à aborder en littérature classique?
Il n’y a aucun sujet que la littérature que vous qualifiez de «classique» ne
peut aborder. Simplement, l’angle d’attaque diffère d’un genre à l’autre. Le
style également. Comme je viens de le dire, le polar a sa manière à lui de
décrire la réalité et comme la violence (meurtre, viol, rapt etc.) est
souvent au cœur de ses intrigues, il est amené à être plus tranchant que le
roman classique. Il y a une sorte de pessimisme inhérent au polar, une sorte
de vision crépusculaire de la société qui me plaît beaucoup. Une défiance
envers l’humanisme aussi...
Votre façon d’écrire un roman noir diffère t’elle de celle utilisée pour vos
autres romans?
Tout à fait! J’écris de manière plus libre, plus libérée. Je sens moins la
pression de la demande identitaire. Moins le poids des réalités historiques.
C’est pourquoi je prends un plaisir fou à les écrire alors que dans mes
romans habituels, il m’arrive de peiner ou de fatiguer. Je n’éprouve pas
d’angoisse non plus car la page blanche a l’air de se remplir toute seule...
Êtes-vous personnellement lecteur de polar? Si oui, de quel auteur en
particulier?
Malheureusement, non... Dans mon jeune temps, j’ai beaucoup lu Simenon,
Frédéric Dard et certains Américains comme Raymond Chandler. Mais je suis en
train de m’y remettre petit à petit.
Déjà une idée pour l’intrigue du quatrième opus des aventures de Jack
Teddyson? «Meurtre au Chlordécone»?
Cela se déroulera dans le milieu des sectes protestantes qui pullulent aux
Antilles. C’est un monde fascinant dans lequel des pasteurs auto-proclamés
se disputent des fidèles à qui ils promettent monts et merveilles. Sauf que
certains de ces pasteurs sont des escrocs et finissent devant les tribunaux
ou carrément à la prison de Ducos. Le titre de ce 4ème opus se trouve déjà
dans «Bal masqué à Békéland». Il s’agit de «CRIMES PARFAITS A L’ÉGLISE
UNIVERSELLE DE LA RÉDEMPTION CHRÉTIENNE». Il y sera question du pasteur
Songo, qui apparaît déjà dans «Békéland» et de se multiples magouilles pour
se constituer un cheptel évangélique, cheptel au sein duquel certains
fidèles seront mystérieusement zigouillés.
http://www.potomitan.info/confiant/bekeland.php |
Caraïbéditions a
souhaité créer et nourrir un espace d’expression
créole et plus largement « domien ». Elle publie des
ouvrages qui ont tous un lien direct ou indirect
avec les Antilles-Guyane et La Réunion, que ce soit
grâce à la langue (les créoles), grâce aux auteurs
(originaire ou vivant dans les DOM) ou grâce aux
histoires qui se déroulent dans les îles.
Elle a été la première maison d’édition à publier,
dès 2008, des BD célèbres en créole antillais et
réunionnais. Après la publication d’ « Astérix », de
« Titeuf », de « Tintin » et de la série « Les profs
» en créole, Caraïbéditions a souhaité publier ses
propres séries BD en français. C’est ainsi qu’est né
le premier manga des Antilles, « Les îles du vent ».
D’autres BD ont vu le jour : une série sur
l’histoire de l’esclavage « Mémoire de l’esclavage »
(BD parrainée par l’UNESCO), une série abordant les
contes antillais sous forme de BD avec son héros «
Petit-Jacques », une BD sur le chevalier
Saint-Georges, « La légion Saint-Georges », une BD
dont l’histoire se passe en Guyane « Aux îles, point
de Salut », une série manga « Waldo Papaye », une
série Albums Illustrés intitulée « Femme Noire
d’Afrique, d’Amérique et des Antilles » et "Homme
Noir d’Afrique, d’Amérique et des Antilles".
Caraïbéditions publie également des albums jeunesse
en français tels que "La petite fille aux gros
cheveux", "Doudoudrillon" ou une série d’
Abécédaires des Antilles.
« L’étranger » d’Albert Camus en créole antillais et
« Le Petit Prince » d’Antoine de Saint-Exupéry en
quatre créoles sont également au catalogue de
Caraïbéditions, tout comme « Kod Yanm » de Raphaël
Confiant ou « Trajédi Rwa Kristof » d’Aimé Césaire.
"Kokolo", le guide des mots du sexe et de l’amour en
créole, d’Hector Poullet figure aussi dans cette
collection en créole.
Caraïbéditions possède une collection polar. Raphaël
Confiant y a publié ses romans policiers « Citoyens
au-dessus de tout soupçon » (bientôt en poche chez
Folio Policier), « Du Rififi chez les fils de la
veuve » et "Bal masqué à Békéland". Ernest Pépin y a
également publié son premier polar« La Darse Rouge
».
Une collection universitaire est également au
catalogue de Caraïbéditions. Elle se veut présenter
des ouvrages écrits par des professeurs et
universitaires de l’UAG.
Découvrez l’univers des BD, contes et romans
célèbres en créole des Antilles-Guyane et de La
Réunion (Saint-Exupéry, Césaire, Confiant, Uderzo,
Hergé, Zep...). Découvrez la première collection de
polars antillais (en français) écrits par Raphaël
Confiant, Ernest Pépin... |
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